mercredi 25 juillet 2012

Affaire des trois diplomates algériens Les dessous d’une libération (PRESSE ALGERIENNE)

Le MUJAO (Mouvement pour l’Unicité et le Jihad en Afrique de l’Ouest) a raflé le jackpot à Al Qaida qui, pourtant, était considérée comme étant le groupe terroriste le plus redoutable dans les prises d’otages d’étrangers dans le Sahel. Désormais, le MUJAO semble devenu le nouveau «maître» des lieux. C’est ce même groupe terroriste qui a, récemment, relâché les trois diplomates algériens sur les sept enlevés le 5 avril dernier à Gao. Voici les dessous de cette libération «inattendue».
Qui a négocié avec le MUJAO ? Pourquoi les ravisseurs n’ont-ils libéré que trois des sept diplomates algériens ? L’Algérie a-t-elle payé une rançon ou libéré des islamistes détenus dans ses prisons en contrepartie de la libération de ses trois citoyens ?
Et pourquoi la libération des trois Algériens est-elle intervenue au moment où le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius se trouvait à Alger ? Autant de questions sans réponses. D’abord, il est important de signaler que, parmi les médiateurs ayant négocié avec les terroristes du MUJAO pour arriver à libérer les otages algériens, figurent le président burkinabé, Blaise Compaoré.
Ce dernier est devenu le véritable intermédiaire des prises d’otages au Sahel après une concurrence rude avec son homologue malien, l’ex-président Amadou Toumani Touré, renversé de son fauteuil le 22 mars dernier. Cette situation a joué au profit du président burkinabé qui se retrouve, désormais, seul à négocier la libération des otages et avoir sa part du gâteau après chaque libération.
Donc, Blaise Compaoré a joué l’intermédiaire dans l’affaire des trois diplomates algériens et c’est aussi grâce à son rôle que les trois humanitaires européens, enlevés en novembre 2011, ont été également relâchés par le MUJAO, il y a quelques jours seulement.
Revenons sur le cas des trois diplomates algériens. On croit savoir de plusieurs sources maliennes et celles proches des négociations que l’Algérie a évidemment négocié avec le Mujao la libération de trois des sept membres de son consulat à Gao. Il n’est un secret pour personne que les membres du Mujao sont loin d’être des anges.
Le chef terroriste de cette nébuleuse organisation, un certain Abdoul Hakim et ses hommes ont créé depuis des années une «entreprise» criminelle grâce à laquelle ils excellent et prospèrent dans la prise, l’achat et la revente d’otages occidentaux.
Les otages européens, deux Espagnols et une Italienne, enlevés en Algérie et précédemment détenus par le Mujao (Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest) ont regagné sains et saufs leurs pays, vendredi dernier. Ils ont transité par Gao d’où ils ont embarqué pour Ouagadougou (Burkina Faso) à bord d’un avion de ce pays. C’est d’ailleurs grâce à l’intermédiation burkinabée qu’ils ont été libérés.
Contre quoi ? On sait que le Mujao, rien que contre la libération des deux femmes, demandait 30 millions d’euros. Mais les ravisseurs auraient revu leurs prétentions à la baisse, ils déclarent n’avoir perçu que 15 millions d’euros. Mais cette rançon n’a pas été la seule monnaie d’échange car la transaction a concerné également la libération d’islamistes détenus en Mauritanie et en Algérie. Selon certaines sources, un seul islamiste, emprisonné en Mauritanie, aurait été libéré.

Le MUJAO rafle le jackpot au Sahel

Contrairement à Aqmi, le MUJAO ne chercherait pas de l’argent pour mener des activités terroristes, se cantonnant dans divers trafics et dans la contrebande. En effet, à en croire certaines informations en provenance des habitants qui le côtoient à Gao, le MUJAO serait prêt à se retirer du Nord.
Il n’attendrait plus le top départ de l’armée régulière vers le Nord pour disparaître dans le désert. En attendant, ses jours sont comptés au nord du Mali. Cette organisation mystérieuse, créée à la fin de l’année passée, est déjà derrière 3 prises d’otages d’étrangers, parmi eux, les sept diplomatesalgériens.
Si ces prises d’otages ont connu une issue heureuse par contre les conditions dans lesquelles la libération des trois Occidentaux est intervenue soulèvent encore une fois des questions : faut-il ou doit-on céder au chantage des preneurs d’otage en payant une rançon ? Il y a quelques mois seulement, l’ancien président du Mali, Amadou Toumani Touré, renversé le 21 mars, faisait l’objet des critiques les plus vives.
On l’accusait d’encourager le paiement de rançons et la libération de présumés terroristes arrêtés pour entrée non autorisée sur le territoire malien et pour port illégal d’armes de guerre.
A l’époque, en 2009, s’il a ainsi pu obtenir la libération d’un otage français détenu par Aqmi, il a également subi les foudres de la Mauritanie et de l’Algérie qui ont rappelé leur ambassadeur pour consultation. Pis, la Mauritanie a failli en arriver à l’incident diplomatique avec son voisin malien. On lui reprochait également de manquer ainsi de fermeté dans la gestion de la lutte contre les groupes terroristes qui se servent du Nord-Mali comme sanctuaire.
Les critiques pouvaient se comprendre car l’argent des rançons payées sert à payer les armes et le matériel militaire qui permettent aux islamistes de perpétrer des attentats à travers le monde, et leur libération permet aux terroristes de reprendre du service et de constituer une nouvelle menace pour les cibles visées.
Mais si le président Touré a été vivement critiqué, ces mêmes raisons pourraient être opposées au président burkinabé, Blaise Compaoré, qui s’est, depuis quelques années, spécialisé dans la libération d’otages contre rançon.
Il est parvenu à faire libérer deux Espagnols, en 2010, et une Italienne, il y a quelques semaines. ATT était également soupçonné de prélever, avec certains membres de son entourage, des « commissions » sur les sommes colossales versées comme rançon. Le même soupçon est valable pour le président du Burkina-Faso. Mais aussi pour le président Abdel- Aziz de la Mauritanie, qui aurait fait libérer l’autre monnaie d’échange.
Et selon des sources concordantes, il y aurait eu au moins trois terroristes de nouveau dans la nature, prêts à l’emploi.
Lotfi Hadji

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