Le MUJAO (Mouvement pour l’Unicité et le Jihad en Afrique de
l’Ouest) a raflé le jackpot à Al Qaida qui, pourtant, était considérée
comme étant le groupe terroriste le plus redoutable dans les prises
d’otages d’étrangers dans le Sahel. Désormais, le MUJAO semble devenu le
nouveau «maître» des lieux. C’est ce même groupe terroriste qui a,
récemment, relâché les trois diplomates algériens sur les sept enlevés
le 5 avril dernier à Gao. Voici les dessous de cette libération
«inattendue».
Qui a négocié avec le MUJAO ? Pourquoi les
ravisseurs n’ont-ils libéré que trois des sept diplomates algériens ?
L’Algérie a-t-elle payé une rançon ou libéré des islamistes détenus dans
ses prisons en contrepartie de la
libération de ses trois citoyens ?
Et pourquoi la libération
des trois Algériens est-elle intervenue au moment où le ministre
français des Affaires étrangères Laurent Fabius se trouvait à Alger ?
Autant de questions sans réponses. D’abord, il est important de signaler
que, parmi les médiateurs ayant négocié avec les terroristes du MUJAO
pour arriver à libérer les otages algériens, figurent le président
burkinabé, Blaise Compaoré.
Ce dernier est devenu le véritable
intermédiaire des prises d’otages au Sahel après une concurrence rude
avec son homologue malien, l’ex-président Amadou Toumani Touré, renversé
de son fauteuil le 22 mars dernier. Cette situation a joué au profit du
président burkinabé qui se retrouve, désormais, seul à négocier la
libération des otages et avoir sa part du gâteau après chaque
libération.
Donc, Blaise Compaoré a joué l’intermédiaire dans
l’affaire des
trois diplomates algériens et c’est aussi grâce à son rôle que les
trois humanitaires européens, enlevés en novembre 2011, ont été
également relâchés par le MUJAO, il y a quelques jours seulement.
Revenons
sur le cas des trois diplomates algériens. On croit savoir de plusieurs
sources maliennes et celles proches des négociations que l’Algérie a
évidemment négocié avec le Mujao la libération de trois des sept membres
de son consulat à Gao. Il n’est un secret pour personne que les membres
du Mujao sont loin d’être des anges.
Le chef terroriste de
cette nébuleuse organisation, un certain Abdoul Hakim et ses hommes ont
créé depuis des années une «entreprise» criminelle grâce à laquelle ils
excellent et prospèrent dans la prise, l’achat et la revente d’otages
occidentaux.
Les otages européens, deux Espagnols et une
Italienne, enlevés en Algérie et précédemment détenus par le Mujao
(Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest) ont
regagné sains et saufs leurs pays, vendredi dernier. Ils ont transité
par Gao d’où ils ont embarqué pour Ouagadougou (Burkina Faso) à bord
d’un avion de ce pays. C’est d’ailleurs grâce à l’intermédiation
burkinabée qu’ils ont été libérés.
Contre quoi ? On sait que
le Mujao, rien que contre la libération des deux femmes, demandait 30
millions d’euros. Mais les ravisseurs auraient revu leurs prétentions à
la baisse, ils déclarent n’avoir perçu que 15 millions d’euros. Mais
cette rançon n’a pas été la seule monnaie d’échange car la transaction a
concerné également la libération d’islamistes détenus en Mauritanie et
en Algérie. Selon certaines sources, un seul islamiste, emprisonné en
Mauritanie, aurait été libéré.
Le MUJAO rafle le jackpot au Sahel
Contrairement
à Aqmi, le MUJAO ne chercherait pas de
l’argent pour mener des activités terroristes, se cantonnant dans
divers trafics et dans la contrebande. En effet, à en croire certaines
informations en provenance des habitants qui le côtoient à Gao, le MUJAO
serait prêt à se retirer du Nord.
Il n’attendrait plus le top
départ de l’armée régulière vers le Nord pour disparaître dans le
désert. En attendant, ses jours sont comptés au nord du Mali. Cette
organisation mystérieuse, créée à la fin de l’année passée, est déjà
derrière 3 prises d’otages d’étrangers, parmi eux, les sept
diplomatesalgériens.
Si ces prises d’otages ont connu une
issue heureuse par contre les conditions dans lesquelles la libération
des trois Occidentaux est intervenue soulèvent encore une fois des
questions : faut-il ou doit-on céder au chantage des preneurs d’otage en
payant une rançon ? Il y a quelques mois seulement, l’ancien président
du Mali, Amadou Toumani
Touré, renversé le 21 mars, faisait l’objet des critiques les plus
vives.
On l’accusait d’encourager le paiement de rançons et la
libération de présumés terroristes arrêtés pour entrée non autorisée
sur le territoire malien et pour port illégal d’armes de guerre.
A
l’époque, en 2009, s’il a ainsi pu obtenir la libération d’un otage
français détenu par Aqmi, il a également subi les foudres de la
Mauritanie et de l’Algérie qui ont rappelé leur ambassadeur pour
consultation. Pis, la Mauritanie a failli en arriver à l’incident
diplomatique avec son voisin malien. On lui reprochait également de
manquer ainsi de fermeté dans la gestion de la lutte contre les groupes
terroristes qui se servent du Nord-Mali comme sanctuaire.
Les
critiques pouvaient se comprendre car l’argent des rançons payées sert à
payer les armes et le matériel militaire qui permettent aux islamistes
de perpétrer des
attentats à travers le monde, et leur libération permet aux terroristes
de reprendre du service et de constituer une nouvelle menace pour les
cibles visées.
Mais si le président Touré a été vivement
critiqué, ces mêmes raisons pourraient être opposées au président
burkinabé, Blaise Compaoré, qui s’est, depuis quelques années,
spécialisé dans la libération d’otages contre rançon.
Il est
parvenu à faire libérer deux Espagnols, en 2010, et une Italienne, il y a
quelques semaines. ATT était également soupçonné de prélever, avec
certains membres de son entourage, des « commissions » sur les sommes
colossales versées comme rançon. Le même soupçon est valable pour le
président du Burkina-Faso. Mais aussi pour le président Abdel- Aziz de
la Mauritanie, qui aurait fait libérer l’autre monnaie d’échange.
Et selon des sources concordantes, il y aurait eu au moins trois terroristes de nouveau
dans la nature, prêts à l’emploi.
Lotfi Hadji
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