lundi 14 mai 2012

Médias : Une radio aux ordres nommée RFI…


« Un forum économique cette semaine à Addis Abeba, un autre la semaine prochaine à Libreville. L’Afrique attire de plus en plus de banquiers et d’investisseurs. À l’initiative du forum de Libreville, on trouve l’homme d’affaire franco-marocain, Richard  qui avait fait la Une des journaux people, il y a quatre ans, lors de son mariage avec Cécilia, l’ex-épouse de Nicolas SARKOZY ».
De qui ce morceau de bravoure? De Radio France Internationale qui n’écoutant que son courage, a choisi de recevoir Richard ATTIAS comme son invité Afrique, le vendredi 11 mai 2012. Soit cinq jours après la défaite de Sarkozy à l’élection présidentielle pour signifier aux auditeurs des quatre coins de la planète que la Radio Mondiale a de nouveaux maîtres (les Socialistes) et qu’il était temps d’essuyer son pied sur celui qui a dicté sa loi dans la maison depuis cinq bonnes années.
RFI prend bien soin de préciser que c’est la presse people qui avait fait des gorges chaudes du divorce de Sarkozy et autant que nous sachions l’écho du divorce présidentiel n’a jamais transpire sur les ondes de la vénérable radio tant que l’hyper-président était aux affaires. Si l’issue du scrutin du 06 mai avait été différente, il ne serait venu à l’idée de personne d’inviter le compagnon ou nouveau mari de Cécilia. La dignité commandait au moins à la radio de limiter son propos au seul événement organisé par M. ATTIAS, mais le journaliste s’est permis sous le prétexte de recueillir le point de vue d’un homme du métier, de demander à l’invité son avis sur la campagne de Sarkozy pour s’ouvrir une brèche conduisant à l’affaire Cécilia.
Maison de Radio France - 116 avenue du Président-Kennedy, 75016 Paris
Voilà RFI dans toute sa nudité, une radio imbue d’elle-même, championne de l’auto-célébration, dont les interviewers, de réputation célèbre, se font facilement un nom sur les leaders africains harcelés de questions parfois des plus indélicates, ridiculisés et même raillés à l’occasion. Le rapport de domination instauré par cette caste médiatique est tel que les correspondants de la radio dans les pays africains deviennent des proconsuls craints et redoutés pour la puissance de l’instrument entre leurs mains.
La réalité est que tous ces grands clercs, qu’ils soient à la maison-mère à Paris ou dans les capitales africaines, sont les employés ou collaborateurs d’une radio totalement aux ordres où le politique dicte sa loi comme dans les républiques bananières dont ils n’ont de cesse de dénoncer les dérives contre la liberté d’expression. On se souvient de Bernard Valero, porte- parole du Quai D’Orsay enjoignant, sur instruction de Alain JUPPE, à la junte de libérer l’ORTM.
À RFI, pas l’ombre d’un BRDM, même pas d’une baïonnette, on tient la maison par le financement public qui est sa seule ressource et qui est voté dans le budget du ministère des Affaires étrangères pour bien montrer qu’il s’agit de la voix de la France à l’extérieur comme le proclamait fièrement son ancêtre l’ORTF sous le général De Gaulle.
Sarkozy, par cette intrusion dans sa vie privée, est bien payé pour l’usage qu’il a fait de la radio mondiale contre les pays où les régimes considérés comme peu coopératifs, voire hostiles.
Les Maliens, qui n’ont pas la mémoire courte, se souviennent du tapis rouge qui avait été déroulé aux pieds du MNLA pour faire payer au gouvernement d’ATT son refus de signer l’accord de réadmission, d’autoriser l’installation d’une base militaire française au Mali et de s’engager franco dans le combat contre Al-Qaïda… Comme un mot d’ordre reçu de la tutelle politique, RFI et France 24 se sont lancé dans une campagne frénétique de promotion de la rébellion touareg et de dénigrement du Mali.
Je me souviens qu’aux premiers heures de la contre-offensive de l’armée malienne à  Tessalit et à Aguel Hoc, qui avait porté un sévère coup, dans la dernière semaine de janvier 2012, RFI avait déniché un invité Afrique qui disait en substance:  » Le Mali n’a pas d’armes pour combattre Al-Qaïda, mais dispose d’assez de moyens pour s’en prendre aux Touaregs ». Depuis, à chaque tournant de la crise, les experts se sont succédé à l’antenne pour jouer les  » ânes savants » sur la crise malienne, certains d’entre eux ignorant sans doute qu’ils prenaient part à une cabale en tant que faire-valoir historique ou scientifique d’un projet éminemment politique, celui de créer un État au nord du Mali, ersatz de l’OERS que l’opposition du président Modibo KEITA avait condamné à mort à la fin des années cinquante.
RFI et France 24, de manière éhontée s’arrachaient les éléments de la direction politique du MNLA, ces blogueurs que JUPPE nous présentait comme d’intrépides chefs militaires avant que la réalité du Djihadisme ne mette à nu le sens de la vraie guerre qui était déclarée au Mali.
George POMPIDOU avait sans doute raison lorsqu’il disait: « quand toutes les bornes sont franchies, il n’y a plus de limite ». Fidèle à cette maxime, Alain JUPPE a fait encore plus fort en allant proclamer au Sénat français la victoire du MNLA et inviter le Mali à venir négocier pour en prendre acte. Le dossier sur les crimes commis à Aguel Hoc lui est-il transmis avec toutes les preuves à l’appui ? Il se contente d’une sobre condamnation des exactions commises dans cette localité. La méthode de mise à mort utilisée à l’occasion par les assaillants portait une signature identifiable entre mille: celle de Al-Qaida. Si l’armée régulière s’était avisée d’exécuter 10 rebelles touaregs et diffusé une telle barbarie sur Internet, le gouvernement d’ATT serait aujourd’hui sous le coup d’une enquête de la CPI. Et puisque les donneurs d’ordre ont décidé que ces massacres de sang froid devaient rester impunis, il ne s’est rien passé.
La CEDEAO menace-t-elle d’intervenir au Nord? JUPPE recadre le mandat et fait un distinguo entre les islamistes bons pour être bombardés et le MNLA avec qui il faut négocier! RFI et France 24 donnent de la grosse caisse pour trier la bonne graine (les laïcs du MNLA) et l’ivraie (les djihaddistes).
Moins de deux mois après, tous ces pyromanes sont rattrapés par leurs mensonges. Ils ont en fait livré la Mali à Al-Qaïda. Ançar Dîne a étendu son aile sombre sur tout le Nord. La France et ses combattants de la liberté du MNLA ont baissé pavillon. Depuis Alain JUPPE est aux abonnés absent, RFI et France 24, sans être aphones, mettent moins de zèle à nous expliquer la situation à Kidal, Gao, Tombouctou et surtout à nous éclairer sur les responsabilités de la France dans le désastre qui prévaut dans la zone.
JUPPE et SARKOZY ont poussé le cynisme jusqu’à aller rédiger la déclaration du Conseil de Sécurité sur le Mali afin qu’elle soit la moins contraignante possible sur la junte et la moins dure qui soit pour le MNLA.
On aimerait bien être une petite souris dans les salons feutrés du Quai d’Orsay pour entendre l’analyse de JUPPE au moment de passer la charge à son remplaçant au cours de cette semaine, notamment sur le dossier du Mali.
Le dernier exemple de propagande médiatique en date orchestrée par RFi, c’est la courte échelle faite à Mohamed Abdelaziz de Mauritanie complaisant invité de l’émission  » Internationale » pour se livrer à une analyse géostratégique des plus indigestes sur la bande sahélienne. L’opération n’avait d’autre but que de faire les « relations publiques » d’un petit télégraphiste de Paris qui, à la commande, exécute des missions dont la portée médiatique est aux antipodes de leur efficacité. Mais qu’importe, il valide le point de Paris sur le Sahel. Le Président nigérien n’est pas si mal vu à Paris parce qu’il entreprend aussi des actions contre les islamistes, mais il a le défaut d’être un militant qui ne se laissera pas briefer par la diplomatie française et RFI pour ânonner un discours de justification et de courte vue qui, comme le serpent de la fable, finit mordre sa propre queue.
« Le Diable à deux cornes: l’orgueil et le mensonge », avait écrit le poète italien Lanza Del Vasto. La droite française sous Sarkozy nous est apparue sous ce trait hideux: l’orgueil de refuser de regarder la réalité en face parce qu’en l’occurrence c’est un pays pauvre et dépendant qui avait le courage de poser une analyse différente mais juste sur les choses ( Libye, bande sahélienne). Pour imposer ses vues, la France a usé et abusé du mensonge sur les forces en présence dans les régions du Nord du Mali. Les premiers charters de touristes hexagonaux accueillis par le MNLA avec caméras et flonflons pour montrer à la face du monde un Nord sécurisé attendra. Honte à ceux qui par la désinformation veulent régner sur les peuples.
Amadou Demba TALL

    du   14 mai 2012

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